La réglementation des délais pour contester les actes administratifs est une compétence fédérale

La réglementation des délais pour contester les actes administratifs est une compétence fédérale

Dans le cadre de la pandémie de Covid-19, la Région wallonne avait adopté un arrêté de pouvoirs spéciaux, confirmé a posteriori par un décret, suspendant temporairement les délais pour introduire un recours en annulation contre les actes administratifs ou les règlements de la Région wallonne devant le Conseil d’État. Cette suspension valait pour 30 jours, entre le 18 mars 2020 et le 16 avril 2020 et a été prorogée jusqu’au 30 avril 2020 inclus.

Par un arrêt n° 69/2022 du 19 mai 2022, la Cour constitutionnelle, amenée à se prononcer sur le recours en annulation introduit à l’encontre du décret confirmant cette suspension, a annulé les dispositions consacrant la suspension des délais de recours devant le Conseil d’Etat. 

La Cour estime que ces dispositions violent les règles répartitrices de compétences. En effet, l’article 160 de la Constitution, qui prévoit la création du Conseil d’État, réserve exclusivement la compétence de régler la procédure devant cette juridiction à l’autorité fédérale. Dès lors, en adoptant une mesure suspendant les délais de recours, la Région wallonne empiète sur la compétence de l’autorité fédérale. 

La Cour constitutionnelle considère, en outre, que la Région wallonne ne pouvait adopter cette mesure en application de la technique des compétences implicites. Les compétences implicites permettent à une entité fédérée de légiférer dans une matière réservée à l’autorité fédérale si cela est nécessaire à l’exercice de ses compétences, si la matière réglée se prête à un règlement différencié et si l’incidence sur cette matière est marginale.

En l’espèce, la Région wallonne justifiait ces mesures, dans le préambule de l’arrêté, aux motifs qu’elles étaient nécessaire car "le dispositif ici mis en œuvre serait privé de cohérence si un recours externe contre un acte administratif était traité différemment d’un recours interne, qu’elle se prête à un traitement différencié dès lors qu’elle ne concerne que les actes des autorités administratives relevant du droit de la Région wallonne et revêt un impact marginal dès lors qu’elle ne s’appliquera que pendant une période très limitée dans le temps".

Cependant, la Cour ne suit pas cette position et estime que la mesure n’est pas nécessaire puisque "le fait de suspendre les délais de rigueur "internes" applicables aux procédures administratives traitées par les autorités relevant de la législation wallonne a pour conséquence de suspendre les délais applicables à l’adoption d’actes qui pourraient faire l’objet d’un recours en annulation devant le Conseil d’État, de sorte que cette mesure suffit pour postposer, par voie de conséquence, la prise de cours des délais de recours "externes" en annulation devant le Conseil d’État à l’égard de ces actes".

La Cour ajoute encore que les autres conditions relatives aux compétences implicites ne sont pas remplies. Elle annule dès lors les dispositions consacrant la suspension des délais.

Toutefois, la Cour constitutionnelle maintient définitivement les effets de la mesure adoptée par la Région wallonne pour éviter toute insécurité juridique concernant les calculs des délais d’introduction d’un recours devant le Conseil d’État. 
 

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