Pas de délit d’entrave lors d’une procédure négociée

Cour constitutionnelle

Dans son arrêt du 9 mars 2016 (P.16.0103.F) la Cour de cassation estimait que la mise en concurrence protégée par cet article n’est requise qu’entre les personnes qui ont répondu à un marché public ayant fait l’objet d’une publicité préalable, à l’exclusion des marchés publics attribués à la suite d’une procédure négociée.

Cette interprétation a été contestée au motif qu’elle créait une discrimination injustifiée entre les victimes d’une violation des principes généraux régissant l’attribution d’un marché public (l’absence de discrimination, la transparence et l’obligation de mise en concurrence réelle et non faussée).

La Cour constitutionnelle constate dans un arrêt 42/2021 rendu le 11 mars dernier que le législateur a légitimement pu estimer que les caractéristiques de la procédure négociée sans publicité étaient difficilement conciliables avec une infraction conçue pour garantir la concurrence entre les soumissionnaires par le caractère libre et public des enchères et soumissions.

La Cour relève que la notion de procédure négociée sans publicité se distingue de la procédure d’adjudication publique et de la procédure d’appel d’offres par 1) la circonstance que le ou les entrepreneurs, fournisseurs ou prestataires de services autorisés à participer ont été préalablement sélectionnés par l’autorité et 2) la possibilité de négociation des conditions de marché entre l’autorité publique et le ou les entrepreneurs.

Après avoir rappelé qu’il ne lui appartient pas de substituer son jugement de valeur à celui du législateur, la Cour constate que le législateur a pu estimer que ces caractéristiques étaient difficilement conciliables avec une infraction conçue pour garantir la concurrence entre les soumissionnaires par le caractère libre et public des enchères ou des soumissions.

Elle a ensuite constaté que la différence de traitement n’était pas disproportionnée, les agissements des auteurs étaient, dans ce cas, passibles de poursuites sur bases d’autres qualifications telles que faux, usage de faux, corruption, prise d’intérêt, voire entrave ou trouble à la liberté des enchère si la procédure négociée devait avoir été préférée illégalement à une adjudication publique ou à la procédure d’appel d’offres.

On notera enfin que la Cour précise avoir, en fonction des poursuites dans l’affaire à propos de laquelle la question préjudicielle lui était posée, limité son examen à la réglementation relative aux marchés publics telle qu’elle était établie par la loi du 24 décembre 1993 relative aux marché publics sans prendre en considération les modifications législatives et réglementaires ultérieures. Gageons que nous reparlerons donc de cette question.