Licencier pour un motif déraisonnable n’est pas une infraction!

Licencier pour un motif déraisonnable n’est pas une infraction!

Par un arrêt du 20 décembre 2021, la Cour de cassation met fin à la controverse selon laquelle le fait de « commettre » un licenciement manifestement déraisonnable au sens de la CCT 109 constituerait, selon certaines juridictions sociales du Royaume, une infraction pénale et de ce fait, se prononce également sur la question du délai de prescription applicable à l’action diligentée par le travailleur en paiement d’une l’indemnité à ce titre.

Par ce même arrêt, la Cour de cassation rappelle que le non-paiement de l’indemnité compensatoire de préavis ne constitue pas non plus une infraction, à défaut d’être visé par l’article 162 du Code pénal social.

1.    Indemnité pour licenciement manifestement déraisonnable

Même si l’article 189 du Code pénal social sanctionne d’une amende administrative le non-respect des CCT rendues obligatoires par arrêté royal, le licenciement qualifié de manifestement déraisonnable par les juridictions du travail ne constitue pas une infraction pénale dans le chef de l’employeur et ne permet donc pas au travailleur d’agir dans le délai de prescription applicable aux actions délictuelles (5 ans).

Tel est en tout cas la conclusion réalisée par la Cour de cassation dans un arrêt du 20 décembre 2021 (S.20.0019.N).

Dans celui-ci, la Cour de cassation constate que la CCT 109 ne contient aucune interdiction pour l’employeur de procéder à un licenciement pouvant revêtir un caractère manifestement déraisonnable.

Ainsi l’employeur qui se rend coupable d’un licenciement manifestement déraisonnable ne commet pas une infraction et ne peut par conséquent se voir infliger une amende administrative.

Ce n’est qu’à la demande du travailleur et pour autant que les juridictions du travail concluent au caractère manifestement déraisonnable du licenciement que cet employeur pourra être condamné au paiement en faveur du travailleur licencié d’une indemnité que les juges fixent entre 3 et 17 semaines de rémunération.

En conséquence, le travailleur qui entend obtenir le paiement d’une indemnité sur base de la CCT 109 doit impérativement introduire son action devant les juridictions du travail dans le délai d’un an prévu à l’article 15 de la loi relative aux contrats de travail.

2.    Le paiement d’une indemnité compensatoire de préavis

La Cour de cassation s’est également prononcée à ce sujet et considère que le non-paiement de l’indemnité compensatoire de préavis, prévu par l’article 39 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, ne constitue pas une infraction visée par l’article 162 du Code pénal social.

En effet, la Cour suprême indique qu’il résulte tant de la structure et du libellé des dispositions du Code pénal social que des travaux parlementaires préparatoires à ce Code, que son article 162, paragraphe 1, 1° ne sanctionne que les violations à la loi sur la protection de la rémunération, à savoir à ce qui est dû à titre de salaire en raison de l'exécution ou de la suspension de la relation de travail, à l’exclusion de l'indemnité due en raison de la fin de la relation de travail.

En conséquence, l’action en paiement d’une indemnité de rupture de contrat de travail est soumise au délai de prescription d’un an organisé à l’article 15 de la loi du 3 juillet 1978.

Avocat(s)