Covid-19: Le Parlement fédéral dote le Gouvernement de pouvoirs spéciaux

Parlement fédéral

 

 

Le 27 mars 2020, le Parlement fédéral a octroyé des pouvoirs spéciaux au Gouvernement fédéral.

Techniquement, deux lois ont été adoptées : l’une relative aux matières régies par l’article 74 de la Constitution (compétences relevant uniquement de la Chambre de Représentants), l’autre spécifique aux matières régies par l’article 78 de la Constitution (compétences dépendant à la fois de la Chambre et du Sénat).

 

Les deux lois ont plusieurs points communs :

  • l’objectif : il s’agit de permettre à la Belgique de réagir à l'épidémie ou la pandémie du coronavirus COVID-19 et d'en gérer les conséquences ;
  • les pouvoirs accordés : les arrêtés royaux peuvent abroger, compléter, modifier ou remplacer les dispositions légales en vigueur, même dans les matières qui sont expressément réservées à la loi par la Constitution ;
  • un possible effet rétroactif de ces arrêtés au 1er mars 2020 au maximum ;
  • les dispenses d’avis : certaines matières sont dispensées des avis légalement ou réglementairement requis tandis que d’autres peuvent bénéficier d’un délai abrégé (en ce compris pour celui de la section de législation du Conseil d’Etat).
  • la durée de la délégation : la délégation est valable 3 mois à partir de l’entrée en vigueur de la loi. Les arrêtés royaux doivent être confirmés par la loi dans un délai d'un an à partir de leur entrée en vigueur, faute de quoi ils sont réputés n'avoir jamais produit leurs effets.

La loi adoptée uniquement par la Chambre précise les actions que le Gouvernement peut mener en utilisant ses pouvoirs spéciaux :

  • combattre la propagation ultérieure du coronavirus COVID-19 au sein de la population, y compris le maintien de la santé publique et de l'ordre public;
  • garantir la capacité logistique et d'accueil nécessaire, y compris la sécurité d'approvisionnement, ou en prévoir davantage;
  • apporter un soutien direct ou indirect, ou prendre des mesures protectrices, pour les secteurs financiers, les secteurs économiques, le secteur marchand et non marchand, les entreprises et les ménages, qui sont touchés, en vue de limiter les conséquences de la pandémie;
  • garantir la continuité de l'économie, la stabilité financière du pays et le fonctionnement du marché, ainsi que protéger le consommateur;
  • apporter des adaptations au droit du travail et au droit de la sécurité sociale en vue de la protection des travailleurs et de la population, de la bonne organisation des entreprises et des administrations, tout en garantissant les intérêts économiques du pays et la continuité des secteurs critiques;
  • suspendre ou prolonger les délais fixés par ou en vertu de la loi selon les délais fixés par lui;
  • dans le respect des principes fondamentaux d'indépendance et d'impartialité du pouvoir judiciaire et dans le respect des droits de la défense des justiciables, garantir le bon fonctionnement des instances judiciaires, et plus particulièrement la continuité de l'administration de la justice, tant au niveau civil qu'au niveau pénal:
    • en adaptant l'organisation des cours et tribunaux et autres instances judiciaires, en ce compris le ministère public, les autres organes du pouvoir judiciaire, les huissiers de justice, experts judiciaires, traducteurs, interprètes, traducteurs-interprètes, notaires et mandataires de justice;
    • en adaptant l'organisation de la compétence et la procédure, en ce compris les délais prévus par la loi;
    • en adaptant les règles en matière de procédure et de modalités de la détention préventive et en matière de procédure et de modalités de l'exécution des peines et des mesures;
  • se conformer aux décisions prises par les autorités de l'Union européenne dans le cadre de la gestion commune de la crise.

A cet égard, la loi apporte les deux précisions suivantes : les arrêtés royaux ne peuvent pas « porter atteinte au pouvoir d'achat des familles et à la protection sociale existante » ni « adapter, abroger, modifier ou remplacer les cotisations de sécurité sociale, les impôts, les taxes et les droits, notamment la base imposable, le tarif et les opérations imposables ».

La loi adoptée tant par la Chambre que par le Sénat précise que le Roi peut prendre des mesures pour « adapter la compétence, le fonctionnement, la procédure, y compris les délais prévus par la loi, de la section du contentieux administratif du Conseil d'Etat et des juridictions administratives afin d'assurer le bon fonctionnement de ces instances et plus particulièrement la continuité de l'administration de la justice et de leurs autres missions ».

Les deux lois ont été publiées au Moniteur belge du 30 mars 2020 et sont entrées en vigueur « le jour de leur publication au Moniteur belge », soit le 30 mars 2020.
 

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