L’indemnité de procédure et l’assurance « Protection Juridique »

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En vertu de l’article 1022 alinéa 1er du Code judiciaire, « l'indemnité de procédure est une intervention forfaitaire dans les frais et honoraires d'avocat de la partie ayant obtenu gain de cause ».

Qu’en est-il alors lorsque la partie qui a obtenu gain de cause a bénéficié de l’intervention d’un assureur « Protection Juridique » pour la prise en charge de l’état de frais et d’honoraires de son avocat ?

Dans une affaire où l’assureur contestait l’état de frais et d’honoraires de l’avocat au motif qu’il n’en déduisait pas l’indemnité de procédure obtenue (et reversée à son client), le Tribunal de Première Instance d’Anvers, division Anvers siégeant en appel, l’a débouté par un jugement rendu le 2 octobre 2014, considérant que l’indemnité de procédure ne revient pas à l’assureur mais « à la partie au procès » qui obtient gain de cause.

Le dossier a atterri devant la Cour de cassation sur pourvoi de la compagnie d’assurances.

Par son arrêt prononcé le 24 mars 2016 (C.15.0136), la 1ère chambre de la Cour a accueilli le pourvoi et cassé le jugement précité.

Dans sa motivation, la Cour commence par rappeler les termes de l’article 1022 du Code judiciaire et précise que le montant alloué au titre d’indemnité de procédure est une indemnisation forfaitaire du coût supporté par une partie à un procès pour s’adjoindre l’assistance d’un avocat.

La Cour renvoie ensuite à l’article 154 de la loi du 4 avril 2014 sur les assurances qui définit le contrat d’assurance de la « Protection Juridique » comme étant celui par lequel « l’assureur s’engage à fournir des services et à prendre en charge des frais afin de permettre à l’assuré de faire valoir ses droits en tant que demandeur ou défendeur, soit dans une procédure judiciaire, administrative ou autre, soit en dehors de toute procédure ».

Elle affirme également que l’assurance « Protection Juridique » est une assurance de dommages et qu’en conséquence elle présente un caractère strictement indemnitaire. De ce fait, cette assurance indemnise les frais de défense supportés par l’assuré dans le cadre d’un litige, sans possibilité pour lui de recevoir plus que ce qu’il a effectivement déboursé.

La Cour conclut que dans la mesure où l’assuré est indemnisé par son assureur « Protection Juridique », à concurrence du dommage qu’il subi en exposant des frais de défense,  il ne peut en outre percevoir une indemnité de procédure destinée à couvrir ce même poste. Celle-ci doit donc revenir à l’assureur « Protection Juridique ».

Il se déduit du raisonnement de la Cour de cassation que l’assureur « Protection Juridique » est fondé à déduire du montant total de l’état de frais et d’honoraires de l’avocat, le montant de l’indemnité de procédure allouée par le juge à son assuré.

L’on notera que, déjà avant cet arrêt, l'article 2.2.5 du protocole d'accord entre les assureurs de protection juridique affiliés à Assuralia, l'O.V.B. et l'O.B.F.G. prévoyait que « l'avocat lorsqu'ils lui sont remboursés par la partie adverse, rétrocède à l'assureur les dépens avancés par ce dernier ou les impute en déduction de son état de frais et honoraires » (règlement de l'O.B.F.G. du 12 décembre 2011 ratifiant le protocole d'accord entre les assureurs protection juridique affiliés à Assuralia et l'Ordre des barreaux francophones et germanophone de Belgique (M.B., 7 février 2012).

Cette règle est donc à présent également consacrée par la jurisprudence de la Cour de cassation.

 

(Voyez également : C. Van Schoubroeck, « Verhaalbaarheid van kosten en erelonen raadslieden ook voor verzekeraars? », in Liber amicorum Jean-Luc Fagnart, Anthemis, 2008, p. 340 ; TOUSSAINT, B., « Actualité : Cour de cassation, 24/03/2016 », RDC-TBH, 2016/7, p. 710-711).

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