Le licenciement d’un contractuel par un employeur public n’est pas soumis à l’obligation de motivation formelle

Le 24 avril 2012, la Cour du travail de Gand (division Bruges) avait estimé que la loi du 29 juillet 1991 relative à la motivation formelle des actes administratifs était applicable au licenciement d’un agent contractuel par un employeur public, avec pour conséquence l’obligation pour ce dernier de motiver formellement la décision de licenciement. Elle avait également considéré que l’audition préalable de l’intéressé était obligatoire au nom des principes de bonne administration. Selon cette juridiction, qui s’inscrivait dans une jurisprudence relativement répandue, le préjudice résultant de l’absence d’audition et de motivation constituait une perte d’une chance d’éviter le licenciement ainsi qu’une diminution de la chance de retrouver un emploi. Elle avait en l’espèce fixé le préjudice moral à 2.500 EUR.

Le 12 octobre 2015, la Cour de cassation a cassé cet arrêt en ce qu’il impose une motivation formelle de la lettre de licenciement : la Cour suprême déclare que le juge qui applique à cette situation l’article 2 de la loi du 29 juillet 1991 relative à la motivation formelle des actes administratifs ne justifie pas légalement sa décision.
 
La Cour de cassation rappelle également que les travailleurs contractuels employés par les communes étaient soumis à l’article 1er, 2ème alinéa de la loi de 1978 relative aux contrats de travail, si bien que la réglementation régissant la rupture des contrats de travail à durée indéterminée n’impose pas à l’employeur d’entendre le travailleur avant de procéder à son licenciement, et qu’il ne peut y être fait exception sur la base du principe général de droit de bonne administration.

La décision de la Cour de cassation va à l’encontre de la position adoptée jusqu’alors majoritairement par les Cours du travail (en tout cas francophones) qui imposaient la motivation formelle du licenciement d’un agent contractuel et l’audition préalable de l’intéressé.

Désormais, l’employeur public qui licencie un de ses agents contractuels ne serait donc plus tenu de respecter le prescrit de la loi relative à la motivation formelle des actes administratifs dans la lettre de licenciement, ni de procéder obligatoirement et systématiquement à une audition préalable.

Cet arrêt creuse en tout cas l’écart entre les travailleurs du secteur public et ceux du secteur privé, pour lesquels la question de la motivation du licenciement est réglée depuis peu par la Convention collective de travail n° 109 du 12 février 2014.

Gardons-nous cependant d’en tirer des conclusions hâtives, tant la question est délicate et suscitera certainement de nombreux débats et commentaires.

Avec la participation de Laurine PAULY

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