Obligation pour les employeurs de mesurer le temps de travail de leurs salariés

Pointeuse

Le litige au principal opposait un syndicat espagnol à la Deutsche Bank, le premier souhaitant obtenir un jugement constatant l’obligation pour la seconde d’établir un système d’enregistrement du temps de travail journalier effectué par les membres de son personnel, permettant de vérifier le respect, d’une part, des horaires de travail prévus et, d’autre part, de l’obligation de transmettre aux représentants syndicaux les informations relatives aux heures supplémentaires effectuées mensuellement.

La juridiction espagnole, constatant que le droit espagnol, tel qu’interprété par la jurisprudence interne, impose uniquement la tenue d’un registre des heures supplémentaires effectuées par les travailleurs, a décidé de poser une question préjudicielle à la Cour de justice quant à la conformité de cette règle interne avec le droit de l’Union.

Selon la Cour, afin d’assurer l’effet utile des droits prévus par la directive 2003/88 (repos journalier, repos hebdomadaire, durée maximale de travail), ainsi que du droit fondamental consacré à l’article 31 § 2 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, les Etats membres doivent imposer l’obligation de mettre en place un système objectif, fiable et accessible permettant de mesurer la durée du temps de travail journalier effectué par chaque travailleur.

En l’absence d’un tel système, il n’est possible de déterminer de façon objective et fiable ni le nombre d’heures de travail effectuées par le travailleur ainsi que leur répartition dans le temps, ni le nombre des heures supplémentaires.

L’impact de cet arrêt n’est pas négligeable dès lors qu’à l’heure actuelle, seules quelques législations particulières prévoient des obligations similaires en droit belge.

Ainsi, par exemple :

  • En matière d’horaires flottants, l’article 20ter de la loi du 16 mars 1971 sur le travail impose à l’employeur de prévoir un système de suivi du temps, qui doit comprendre certaines données telles que la durée des prestations de travail par jour et le début et la fin de ses prestations ainsi que ses pauses.
  • Les employeurs qui relèvent de la Commission paritaire de l'industrie hôtelière doivent tenir un registre de mesure du temps de travail pour leurs travailleurs occasionnels (arrêté royal du 30 avril 2007 relatif à la tenue d'un registre de mesure du temps de travail dans les entreprises ressortissant à la commission paritaire de l'industrie hôtelière).
  • Concernant les professionnels de la santé, l’employeur est tenu de disposer, sur le lieu de travail d'un registre reprenant les prestations journalières effectuées par les travailleurs (loi du 12 décembre 2010 fixant la durée du travail des médecins, dentistes, vétérinaires, des candidats-médecins en formation, des candidats-dentistes en formation et étudiants stagiaires se préparant à ces professions).

Il n’existe toutefois aucune obligation générale pour l’employeur en matière de mesure de temps de travail.

La balle est donc à présent dans le camp du législateur, qui devrait en principe faire le nécessaire pour que la Belgique se conforme aux nouvelles exigences européennes en la matière.
 

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